Myrose Masseaux-Caillet, médiateur familial libéral

Sortir des conflits par la grande porte

11 janvier 2007

Découvrez dans les quelques lignes ci-dessus une “brève” description de la profession de médiateur familial.

Le métier de médiateur familial, Myrose Masseaux-Caillet l’exerce en libéral depuis 1995. Mais bien avant cette date, elle le pratiquait sans vraiment s’en rendre compte. « Mon Dieu », dit-elle « cela fait tellement longtemps ». Cette Bénédictine voulait épouser le métier d’assistante sociale. Mais le destin en a décidé autrement. Car, pour se former, l’unique solution était de quitter l’île pour la France. Depuis peu, il est devenu possible de se spécialiser dans le département.

Cela fait longtemps

La Réunion, elle l’a quitte malgré tout. Destination la France où mariée, elle s’occupe de ses enfants. En 1971, elle est de retour. Rapidement, elle devient la responsable du suivi des procédures et de l’exécution des décisions de justice à l’ARAJUFA. Jusqu’à aujourd’hui, cette association socio-juridique vient en aide à toute personne défavorisée. Mais pas seulement !

Rapprocher des personnes qui se sont aimées

Moult dossiers délicats sont passés entre ces mains. Elle découvre toute la souffrance d’êtres en détresse. En effet, des femmes divorcées à juste raison s’inquiétaient du non versement de la pension alimentaire par leurs ex-époux. D’où de violentes altercations ! Dans pareil cas, elle ne prenait parti ni pour l’un, ni pour l’autre ! Elle visait le rapprochement entre personnes qui, auparavant, se sont aimées. Aujourd’hui, elles se déchirent devant leurs enfants. Mais les marmailles, loin de comprendre ce qui arrive aux parents, sont pris en otage. La conciliation est souvent mouvementée, mais des “miracles” se produisent !

Souffrance

Avec ces expériences, elle découvre la souffrance sur fond de misère sociale. Coûte que coûte, elle veut aider ces familles ! Une formation s’impose. En 1993, à l’initiative de l’ancien Directeur de l’ARAJUFA, Thierry Caillet - son mari, et ce n’est un secret pour personne - la première formation de médiateur familial est organisée à La Réunion. Le concours des formateurs de l’Institut Européen de Médiation Familial (IEMF) français, anglais et québécois a été bénéfique. Sur 2 années, des cours de psychologie, sociologie, les techniques de négociations, de communication, d’écoute, le droit de la famille, la gestion des conflits et des émotions sont dispensés aux stagiaires. Cerise sur le gâteau, il leur était demandé de soutenir un mémoire. Succès pour Myrose Masseaux-Caillet.

Première formation de médiateur familial à La Réunion

Pourquoi s’arrêter en si bon chemin ! Elle décide de valider ses acquis pour un diplôme d’État de médiateur familial reconnu depuis un décret de 2003 (voir encadré). Cette mesure, explique-t-elle, « protège la profession » qui ne s’improvise pas.

Validation des acquis

En cette période, on ne se bouscule pas au portillon. Mais le téléphone portable comme le fixe ne cesse de sonner. Pas un mot sur ces appels car la confidentialité est l’élément clé de tout entretien pour désamorcer une situation complexe. Habituellement, en cas de divorce par exemple, une des deux personnes concernées prend l’initiative de l’appeler. Puis un rendez-vous lui est donné à Saint-Denis.

Premier entretien

Elle l’invite à s’asseoir pour entamer un entretien sur le même pied d’égalité. Après avoir fait le tour du problème, un autre rendez-vous est pris en présence des futurs divorcés et du ou des enfants, suivant le cas. Assis en forme de triangle pour la fluidité de la communication, ensemble, un terrain d’entente est trouvé après quelques séances. Des gens qui ne se parlaient plus discutent à nouveau.

Humilité et connaître ses limites

Elle écoute. Elle ne se contente pas d’entendre ce qu’ils “évacuent”. Cette capacité - d’écoute - requiert un minimum de qualité et de qualification. Et d’énergie aussi car « je fais éponge à force d’entendre les souffrances des êtres ». Autre chose : pour elle, « un bon médiateur doit être rempli d’humilité, connaître ses limites et savoir passer le relais aux confrères ». Au cœur de cette médiation, se trouve « le travail de deuil, la préservation des intérêts du couple ». Car les personnes en présence doivent parvenir à se projeter dans l’avenir. Myrose Masseaux-Caillet ne fait que les accompagner. En effet, elles ont en elle la réponse à leurs problèmes.

J.-F. N.


Elle a dit :

« Écouter et non pas entendre », insiste-t-elle, tout en gardant une distance suffisante. Les situations sont tellement complexes. Il est donc nécessaire en outre d’être impartial.

Son métier, elle l’exerce...

... par ailleurs à Mayotte. Pour cette île, elle a eu « un coup de cœur ». Son pied à terre : une famille musulmane. Elle l’a acceptée comme elle a accepté les coutumes de ce territoire français. Au contact d’elle, elle s’est enrichie. Identité nouvelle ! Croyances nouvelles ! Avec une petite subvention de la DASS et la médiatisation de cette action de médiation familiale par la station RFO de cette île, elle œuvre à la réconciliation des familles déchirées. Pour preuve, « j’ai vécu des moments très forts d’amour, d’émotion avec le retour d’un petit-fils auprès de sa grand-mère ». Autre projet en cours : « l’accompagnement à la parentalité ». Il se veut un outil de rencontre entre parents et enfants. Ce n’est pas tout. Au Tribunal de Mamoudzou, elle est enquêteur familial.

Autre pays, autres mœurs

À Mayotte, qu’elle surprise pour elle de constater que « l’enfant appartient au village ». Une façon imagée pour dire si un enfant vient à commettre une erreur. Le “village” est là pour remettre un peu d’ordre dans ces égarements. Dans cette île, remarque-t-elle au passage, « les Aînés ne se retrouvent pas dans les maisons de retraites, les grands-mères gardent les enfants ». D’où la sauvegarde des traditions. Mais pour combien de temps encore ?

Bien souvent...

... et au bout de quelques séances de médiation avec Myrose Masseaux-Caillet, les enfants sont présents. Un espace a été aménagé pour qu’ils se sentent comme chez eux. Elle est aussi leur porte-parole en cas de divorce. Dans le creux de son oreille, ils lui disent le fond de leur pensée en toute confidentialité. Elle pose un mot sur leur souffrance car ils se sentent coupables de ce qui arrive à leurs parents !

Le décret n°2003-166...

... du 2 décembre 2003 porte sur “la création du diplôme d’État de Médiateur familial”. L’article 1 « atteste des compétences nécessaires pour intervenir auprès des personnes en situation de rupture ou de séparation, afin de favoriser la reconstruction de leur lien familial et aider à la recherche de solutions répondant aux besoins de chacun des membres de la famille ». Cette disposition, pour Myrose Masseaux-Caillet, valorise un métier passionnant. Aider une personne lorsqu’elle le demande est une assistance sociale pour un nouveau départ dans la vie de famille et professionnelle.

Côté poésie

Myrose Masseaux-Caillet se passionne pour la poésie. Juste le temps d’une évasion au cœur de ses souvenirs, ses émotions, qu’elle déverse sur des pages et des pages. Elle prend soin de les ranger une à une dans des classeurs. De temps à autres, elle les feuillette pour les lire à voix basse à ses invités. « J’aime m’enfoncer dans le creux de tes bois, enlacer tes arbres pleurant des larmes d’or, j’aime entendre ce que tu me dis tout bas, au fond de tes ravines remplies de trésor ». Ces quelques vers d’“Ile femme” traduisent son amour et la nostalgie pour son île qu’elle a quittée au siècle dernier, dans les années 70.

Les pensées...

... de ce médiateur familial après “quelques années” passées à faciliter le dialogue entre des pères, des mères et des enfants : « Se séparer, ce n’est pas un échec, c’est le meilleur choix à faire pour tendre vers un mieux-être et se réaliser enfin » ; « Communiquer après s’être séparés, c’est au moins reconnaître que l’autre existe encore ! » ; « Il est insupportable de lire la souffrance dans le regard d’un enfant, mais il est merveilleux de le voir sourire ».


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