Contrat d’avenir en statu quo

’Stop aux effets d’annonce’

12 avril 2005

Janvier, mars et aujourd’hui avril : les échéances s’égrènent et toujours pas de contrat d’avenir pour La Réunion qui, plus que des promesses, attend des actes. Jean-Hugues Ratenon, président d’’Agir pou nout tout’ parle d’un dossier à traiter en urgence et interpelle la Préfecture pour réunir au plus vite, autour d’une table, les acteurs compétents afin de définir des ’objectifs crédibles et honnêtes’ pour ces fameux contrats.

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Contrairement à ce que l’on entend, le contrat d’avenir ne vient pas renforcer les dispositifs existants, attendu que les contrats aidés, qui ont nettement diminué, sont amenés à disparaître d’ici le 1er janvier 2006. Comme le veut la logique du gouvernement, le contrat d’avenir vient donc remplacer les CIA, financés intégralement, et combler l’échec du RMA, re-concentré sur le secteur marchand dans le plan Borloo. "On ne souhaite pas de nouvel échec pour le contrat d’avenir, mais l’on dit stop aux effets d’annonce", affirme le président de l’association panonaise, car ce sont environ 80.000 Réunionnais qui peuvent prétendre à ce nouveau dispositif.

"Pour l’instant, c’est n’importe quoi !"

Toujours pas de commission de pilotage pour définir l’attribution des contrats, pas de projets d’embauche, pas de plan de financement pour le volet obligatoire de formation, la Région Réunion, l’ANPE et l’ADI sont toujours en attente de directives... "Comment embaucher 10.000 contrats en 2005, alors que rien n’est encore fait ? Comment former 10.000 personnes ? Avec quelle formation et pour quel emploi durable ? Dans quel centre de formation et sur quel métier ?", interroge à la chaîne Jean-Hugues Ratenon qui estime que ces questions cruciales sont occultées du dossier.
"Pour l’instant, c’est n’importe quoi !" Si l’on n’a pas pu intégrer 10.000 emplois jeunes en 5 ans, la promesse de 45.000 contrats aidés sur 3 ans lui semble bien présomptueuse, voire improbable. D’autant que le financement dégressif de l’État devrait interpeller et engendrer une concertation des acteurs concernés dès aujourd’hui pour définir les moyens à mobiliser sur 3 ans. Cette attente laissant mûrir les plus vives inquiétudes s’agissant de la solvabilité d’un tel dispositif, censé relancer l’emploi à La Réunion, "Agir pou nout tout" estime qu’il faut se montrer plus réactif et pragmatique.

Réfléchir en amont

Pour rendre opérationnel ce dispositif, il est impératif que la commission de pilotage, co-présidée par le Département et la Préfecture, recense déjà les besoins de la société réunionnaise afin d’élaborer des projets cohérents d’emploi. Il faut qu’elle identifie les métiers en tension qui émergent dans le service public. Un plan de formation doit être adapté aux besoins de la société, des métiers, comme du jeune embauché.
"Réfléchir en amont", voilà ce que revendique clairement Jean-Hugues Ratenon, car la problèmatique de l’emploi ne peut se traiter plus longtemps au coup par coup. Un plan de financement doit être dressé pour pallier le financement dégressif de l’État et répondre aux objectifs ambitieux de pérennisation des emplois. Il plaide pour la "mise en place de projets à caractère départemental voir intercommunal et la mobilisation du Fonds régional de développement pour l’emploi (FRDE), transféré dès cette année aux communes." Reliquats de 2003 et 2004 compris, il évalue ce fonds à près de 250 millions d’euros, ce qui représente beaucoup d’argent à investir uniquement dans l’emploi à La Réunion et il faudra rester vigilant quant au respect de cette prérogative.
"Il faut arrêter de marcher la tête en bas", soutient Jean-Hugues Ratenon qui défend sans relâche la mise en place d’un Observatoire de l’emploi à La Réunion, pour réaliser des recensements précis et faire des projections. L’émergence du Comité de vigilance au sein de la collectivité régionale lui donne bon espoir et laisse à penser qu’il ne se limitera pas à la question des licenciements.

"Stop madame Dindar !"

Nassimah Dindar qui relaye la politique du gouvernement ne doit pas négliger l’ampleur des objectifs annoncés par le plan Borloo. "C’est la première fois qu’un gouvernement fait de telles annonces", à savoir 45.000 contrats disponibles sur 3 ans, 75.000 sur 5 ans, soit l’équivalent du nombre de Rmistes recensés au 1er décembre 2004 à La Réunion, souligne Jean-Hugues Ratenon. Il note qu’"un gouvernement qui prévoit de supprimer tous les Rmistes de France en 3 ans ou du moins jusqu’au 29 mai, c’est formidable", si ce n’est que l’on est face à un "plan Borloo (qui) est à durée déterminée."
Si "Agir pou nout tout" voulait et veut toujours croire aux contrats d’avenir, son président, qui pensait que l’arrivée d’une femme à la tête d’une grande collectivité comme celle du Département, une femme au discours social fort, allait changer les choses, estime qu’"il faut arrêter la politique spectacle. Le Conseil général, ça n’est pas la Star Academy (...) La population attend, elle est désorientée, on le constate au quotidien. Nous recevons des familles qui n’ont plus rien et à qui l’on distribue des bons pour donner à manger à leurs enfants le soir. On ne peut plus continuer comme ça, stop madame Dindar !"
Jean-Hugues Ratenon soutient que son association "va continuer à militer" pour le droit à l’information, le droit à un travail pour chaque citoyen réunionnais.

Estéfany


Perte de confiance

Comme à chaque visite ministérielle, "Agir pou nout tout" interpelle le gouvernement sur l’ampleur des difficultés rencontrées par la population réunionnaise. Lors de son passage en février, Brigitte Girardin a reçu une motion de l’association faisant état de ses inquiétudes. Après une brève entrevue, elle a promis à Jean-Hugues Ratenon d’étudier plus en détail les difficultés énoncées et d’organiser une réunion de travail pour en discuter.
Depuis, l’association interpelle son cabinet qui ne donne aucune suite aux promesses de la ministre de l’Outre-mer. Pour sa prochaine visite, le 14 avril, "Agir pou nout tout" l’interpellera à nouveau sur la question des Observatoires de l’emploi et des prix, de la baisse du pouvoir d’achat, mais aussi sur celle des contrats d’avenir. Puisqu’une interpellation directe n’a pas porté ses fruits, "Agir pou nout tout", qui "a perdu confiance", n’ira pas jusqu’à l’aéroport mais envisagera d’autres moyens pour obtenir les réponses attendues par la population réunionnaise.


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