Amélioration du pouvoir d’achat

Transparence et concurrence pour des prix réduits

8 avril 2008, par Edith Poulbassia

Deux solutions existent pour améliorer le pouvoir d’achat : revaloriser les revenus et baisser les prix. A défaut de satisfaire la première solution, le gouvernement a promis de revoir les prix. D’autant plus que le coût des matières premières ne suffit pas à justifier cette augmentation de prix dans la grande distribution. Le rapport sur les « mécanismes de réduction des prix » remis le mois dernier au ministre de l’Economie préconise plus de transparence et une réforme de la réglementation adaptée aux attentes des consommateurs et au marché moderne. Ces pistes de réflexion seront-elles suivies ?

Dans un contexte d’augmentation des prix et l’existence d’un sentiment de baisse du pouvoir d’achat, le ministre de l’Économie, Christine Lagarde, a confié à un groupe d’experts une étude sur les « mécanismes de réduction des prix ». La journaliste de LCI Valérie Expert et l’économiste Philippe Moati, ainsi que des associations de consommateurs et des représentants de commerçants composent ce groupe de travail. En février dernier, il a réfléchi à des mesures susceptibles d’améliorer le pouvoir d’achat. Il s’agit de trouver les leviers pour faciliter l’accès du consommateur à des prix compétitifs, et d’offrir une meilleure lisibilité des prix au consommateur.

Un système de formation des prix complexe

Le système des prix est devenu complexe. Les offres prolifèrent pour répondre aux attentes individualisées, les canaux de vente aussi, avec des conséquences sur les prix. En fait, les conditions sont telles que « les consommateurs se trouvent face à une offre souvent plus riche, en évolution permanente, à même de répondre avec plus de précision à la spécificité de chacune de leurs attentes. Mais en retour, cette offre est aussi plus complexe à décrypter et recèle de nouveaux risques liés à une diminution de la transparence commerciale vis-à-vis du consommateur ». En 20 ans, le marché à évolué au point que le rapport estime nécessaire de revoir la réglementation et d’armer le consommateur pour mieux faire la transparence sur les prix. Ces deux objectifs permettraient par ailleurs l’émergence d’une concurrence plus saine, où le consommateur pourrait véritablement choisir.

Les soldes deux fois par an...

Deux fois par ans, les consommateurs peuvent bénéficier de réduction de prix : les soldes. Ce sont des périodes de 6 semaines maximum, fixées par la Préfecture après consultation des commerçants et représentants de consommateurs. Les soldes sont surtout efficaces pour le secteur de l’habillement, l’ameublement, produits de sport... Les promotions interviennent en dehors des périodes de soldes, mais sont soumises à des règles. La vente à perte est interdite, sauf dérogation (cessation d’activité, produits périssables, produits soumis à la mode, etc...). Cependant, le rapport conclut que la réglementation de ces réductions de prix (soldes mais aussi promotions) doit aujourd’hui être assouplie pour répondre aux attentes des consommateurs mais aussi des commerçants.

Et le reste de l’année ?

47% des Français profitent des soldes pour des raisons budgétaires, mais ils ne comprennent plus cette limitation des réductions de prix dans le temps. Alors qu’il devient possible de trouver un même produit à des prix moins élevés toute l’année (via les sites discount sur le net, etc...), les consommateurs ont l’impression d’être dupés par le commerce traditionnel.
De leur côté, les commerçants, surtout le commerce spécialisé, peinent à retenir la clientèle tout au long de l’année. Le groupe de travail propose d’établir deux semaines supplémentaires de « soldes flottants » (à chaque commerçant d’en disposer) et de faciliter le déstockage pour permettre aux commerçants de renouveler les produits. « Une telle évolution est bénéfique, souligne le rapport, tant pour les consommateurs, qui bénéficieront plus fréquemment d’informations sur des opérations de prix bas et d’une plus grande variété des produits, que pour les commerçants qui, par le biais des annonces de prix bas et d’une plus grande diversité des produits, amélioreront leur attractivité vis-à-vis des consommateurs ».

Faciliter la concurrence : le low cost

Il revient au pouvoir public de faciliter la concurrence en évaluant « la pertinence des réglementations encadrant l’activité économique des opérateurs dans de nombreux secteurs, au regard de leur impact concurrentiel et de leur nécessité pour les consommateurs ». Cette évaluation est nécessaire pour le low cost ou maxi-discompte, qui assure un rapport qualité-prix intéressant au consommateur. « Il s’agit donc, plus généralement, de repérer et de lever les obstacles au déploiement de l’ensemble des nouveaux concepts d’offre (low cost et autres), leur permettant de se soumettre à l’épreuve du marché et au verdict des consommateurs ». Le rapport met en cause la législation Raffarin qui abaisse à 300 m2 les surfaces commerciales soumises à autorisation d’installation. Or, le maxi-discompte est en moyenne supérieure à 600 m2. La réglementation bloque ainsi la concurrence et une offre pour laquelle il existe une demande des consommateurs.
« Le niveau de prix pratiqué a incontestablement soutenu le pouvoir d’achat du consommateur : sur les marchés de produits ou de services de base, le low cost a permis à ses clients de réaliser des économies transférées sur des dépenses jugées plus “impliquantes” (téléphonie, informatique, loisirs...) ; dans le transport aérien, il a ouvert l’accès au marché à des catégories de consommateurs jusque-là non-clientes. Notons que le développement des produits à marques de distributeurs a exercé le même effet favorable sur le pouvoir d’achat des ménages ». Il faut toutefois rester vigilant quant à l’impact négatif du développement du commerce low cost sur les emplois.

Des offres qui rendent le consommateur captif

Toujours pour éviter de fausser la concurrence, le rapport réclame une plus grande lisibilité sur les offres commerciales. Les forfaits, les offres de fidélisation sont des stratégies en pleine expansion. Mais le groupe de travail constate le manque de transparence sur les coûts de sortie, c’est-à-dire les difficultés que rencontre le consommateur à changer d’opérateur ou de produit. « La clientèle rendue ainsi captive éprouve des difficultés à faire jouer la concurrence entre les offreurs, alors susceptibles de profiter de cette inertie pour accroître les prix ». C’est par exemple la durée d’abonnement minimale de 24 mois pour la téléphonie mobile ramenée à 12 mois par la loi Chatel. Le rapport demande une plus grande précision sur les coûts de sortie, notamment lorsque des prestations gratuites sont proposées au départ.
De façon générale, le groupe de travail propose plusieurs pistes pour que les prix soient visibles. Bien souvent, le prix affiché ne tient pas compte des frais annexes (frais de transport, de dossier, etc...). Pourquoi ne pas rendre obligatoire l’affichage du prix complet ?, demande le rapport, avant l’acte d’achat.

Afficher le taux de variation des prix

Un comparateur public des prix des produits alimentaires vendus dans la grande distribution pourrait aussi contribuer à plus de transparence, estime le groupe de travail. Cependant, une expérimentation pourrait être nécessaire pour évaluer ses effets pervers sur la concurrence. Les commerces pourraient être amenés à s’entendre sur la fixation des prix au lieu de jouer la concurrence. Pour les produits et services vendus dur le net, l’Etat pourrait mettre en place des labels ou des mesures coercitives pour garantir l’impartialité des comparateurs de prix.
Enfin, on l’Etat pourrait imposer l’affichage des taux de variation des prix en grande surface par rapport à une période de référence, au lieu d’une date fixe, pour éviter les manipulations. Mais cette mesure soulève de nombreuses questions sur l’intégration des promotions dans le calcul des prix moyens de référence, et sur l’évolution des produits qui justifie une augmentation des prix.

Synthèse : Edith Poulbassia


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