Les salariés en grève demandent la nomination d’un administrateur judiciaire

Travailleurs mobilisés pour sauver Bourbon Bois

11 septembre 2018, par Manuel Marchal

Depuis hier, les salariés de Bourbon Bois sont en grève. Ils luttent pour sauver leur outil de travail dont ils craignent la disparition. 62 emplois sont en danger avec des répercussions à attendre chez les artisans et les familles qui attendent la réalisation de leur projet d’accession à la propriété. Une fois de plus, le conflit trouve son origine par le fait que l’actionnaire principal de Bourbon Bois est un groupe extérieur à La Réunion. Les travailleurs en lutte sont soutenus par la CFDT et l’UR 974, ils interpellent les actionnaires et le préfet afin que l’entreprise soit placée sous procédure de sauvegarde, avec la nomination d’un administrateur judiciaire.

Depuis hier, les travailleurs de Bourbon Bois ont décidé d’utiliser le moyen ultime pour sauver leur entreprise qu’ils estiment menacée : la grève. Ils sont soutenus dans leur combat par la CFDT et l’UR974. Hier matin, ils avaient barré la route devant le siège de l’atelier de Bourbon Bois dans la zone industrielle du Port-Est. Clara Derfla, secrétaire générale de l’UR974 et Johnny Lagarrigue, secrétaire général de la CFDT-BTP étaient à leurs côtés.
La réalisation des projets d’accession à la propriété financés par l’APL constituent une partie de l’activité de Bourbon Bois. Une récente décision du gouvernement a mis fin à cette mesure. Pour les travailleurs, la direction choisit le prétexte de la suppression de l’APL accession pour tenter de faire passer un plan de licenciement qui ne serait que la première étape vers la fermeture définitive de l’entreprise.

Évaporation des profits en dehors de La Réunion

En effet, Bourbon Bois est une filiale d’un groupe extérieur, GLV, dont le centre d’intérêt principal n’est pas La Réunion. Johnny Lagarrigue, explique que les représentants du personnel ont eu recours au cabinet d’expertise SECAFI pour faire la lumière sur les arguments de la direction prétendant l’entreprise en sérieuse difficulté. SECAFI a examiné les comptes des 8 dernières années.
Les conclusions de l’expertise disent en substance que les profits réalisés par les travailleurs de Bourbon Bois ont servi à renflouer les caisses d’autres sociétés du groupe. 12 millions d’euros ont ainsi été transférés vers une filiale antillaise de GLV. Le rapport d’expert met aussi en évidence un transfert de 200.000 euros, puis de 385.000 euros vers une autre filiale, Sancho, qui n’emploie que 3 salariés.
Les syndicalistes dénoncent cette gestion, révélatrice de l’attitude de certains patrons qui viennent à La Réunion pour profiter d’un cadre fiscal favorable, empochent les subventions, rapatrient les profits ailleurs puis abandonnent le navire quand le cadre légal change. Clara Derfla voit dans ces pratiques un véritable « pillage ». « Les Réunionnais n’ont pas besoin de patrons comme ça », souligne-t-elle.

Entreprise viable

Bourbon Bois connaît son deuxième conflit social de l’année. En avril, le premier avait déjà été une conséquence de la suppression de l’APL Accession. La direction avait alors signé un protocole d’accord où elle s’engageait à présenter une feuille de route pour la poursuite de l’activité. Une assemblée générale des actionnaires devait également être convoquée en juin ou juillet. Aucune réponse n’a été donnée à ces engagements, et 40 % du personnel est en chômage partiel.
Johnny Lagarrigue rappelle qu’au moment de l’annonce de la suppression de l’APL accession, la CFDT, la CGTR et la CAPEB avaient négocié avec la Région Réunion le financement de 523 dossiers. 134 devaient bénéficier à Bourbon Bois, ce qui garantit une activité jusqu’à fin 2019.
Dans un autre domaine la direction ne reste pas inactive. Elle a ainsi présenté un « Plan de sauvegarde de l’emploi » visant à licencier une partie du personnel. Ce PSE a été refusé par la DIECCTE. Le dirigeant de Bourbon Bois, M. Levilain, a ordonné le transfert de l’activité du site de Saint-Pierre au Port, mesure qui touche une vingtaine de salariés. Les représentants du personnel refusent ce transfert, car ils estiment que le dirigeant prend une décision qui va au-delà de la délégation de compétences que lui a accordé le Conseil d’administration de la société. Pour les syndicalistes, l’objectif de la direction est d’organiser la faillite de Bourbon Bois, afin de trouver le prétexte à la fermeture de l’entreprise.

Les syndicats interpellent le préfet

Les travailleurs portent les revendications suivantes :
Tout d’abord, ils demandent une feuille de route claire pour l’avenir de Bourbon Bois. Ensuite, ils demandent aux actionnaires de prendre leurs responsabilités en faisant cesser des pratiques managériales que les syndicalistes considèrent comme du harcèlement moral visant à pousser des salariés à la démission.
Enfin, ils demandent que l’entreprise soit placée sous procédure de sauvegarde avec nomination d’un administrateur judiciaire.
« L’intersyndicale compte beaucoup sur l’intervention du préfet », affirment Clara Derfla et Johnny Lagarrigue, car Bourbon Bois est une entreprise qui a largement bénéficié de subventions publiques grâce au financement de travaux liés à l’APL accession.
En effet, contrairement à ce que pourrait laisser croire la demande d’un PSE de la part de la direction, Bourbon Bois est une société viable, souligne Clara Derfla, et des repreneurs se sont manifestés.

M.M.

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