SDIS

Un “plan d’action” et des ambiguïtés

24 mars 2007

Le Service départemental d’Incendie et de Secours (SDIS) a réuni hier après-midi son conseil d’administration. Il devait notamment voter les orientations budgétaires 2007, le vote du budget devant intervenir avant la fin mars. Les orientations présentées par la présidente déléguée du SDIS, Nassimah Dindar, décrivent un état critique du SDIS, sur l’organisation et le fonctionnement duquel la Chambre régionale des comptes a fait part de son « inquiétude ». « Il est urgent d’agir », a dit Nassimah Dindar. Le problème est celui de la méthode...

Les orientations budgétaires du SDIS ont été débattues hier au Conseil général dans un contexte de crise, plusieurs dizaines de pompiers permanents manifestant devant les grilles et demandant à être reçus. Ce n’est qu’une partie du problème, mais d’après le peu qu’il nous a été donné d’entendre, il ne peut être réglé que sur une décision politique. Et il n’est pas ressorti clairement hier que quelqu’un avait vraiment envie de l’obtenir.
Le problème général est celui du SDIS, dont la capacité à répondre à ses missions opérationnelles est aujourd’hui mise en doute. Nassimah Dindar a évoqué trois séries de difficultés à résoudre : des dysfonctionnements à l’opérationnel, un niveau d’investissement très faible et une mauvaise gestion des ressources humaines. Le Conseil général a augmenté sa participation de 77,4% sur la période 2000-2005, mais l’essentiel de ces crédits a été absorbé par les charges de fonctionnement au détriment de l’investissement. Et à cet égard, la Chambre régionale des comptes pointe quelques abus, sur lesquels il faudra revenir.

La crise du personnel est liée à la situation des sapeurs-pompiers volontaires, dont certains permanents, intégrés à la fonction publique territoriale, demandent qu’on leur reconnaisse le statut de pompiers professionnels. Entre 2001 et 2005, le nombre des sapeurs pompiers professionnels a augmenté de 27% tandis que le personnel administratif et technique a progressé de 158%. Ces derniers agents sont deux fois plus nombreux à La Réunion que dans d’autres SDIS équivalents. C’est aussi la désorganisation dans la gestion des formations et ceux qui viennent de passer le concours en savent quelque chose.
« Il est donc urgent d’agir »,
a conclu la Présidente du Conseil Général, qui est aussi présidente déléguée du SDIS et a annoncé à ce titre trois axes prioritaires : renforcement des capacités d’intervention opérationnelle, relance des investissements et mobilisation des hommes autour d’un projet de service commun. Nassimah Dindar en a confié le pilotage au directeur du SDIS, le colonel Carolis, appuyé sur un « groupe restreint » réunissant les directeurs de cabinet du Conseil général, du Préfet et la direction du SDIS, chargé du suivi et de la mise en application du “plan de travail” accompagnant les orientations budgétaires. Le plan d’actions se déploie dans les domaines de la gestion opérationnelle, de la programmation des investissements, la gestion des personnels et la gestion financière. Il est étalé sur huit mois, du 1er mai 2007 au 1er janvier 2008.

Sur l’intégration des sapeurs-pompiers volontaires, les autorités ont admis hier que le concours organisé « afin notamment de permettre l’intégration » des 262 SPV permanents à statut d’agent d’entretien territorial (AET) avait souffert d’une « mauvaise préparation » et de « beaucoup de précipitation ». Tout en répétant que « la seule voie légale d’accès au corps des sapeurs-pompiers » est le concours, ils admettent que la voie indiquée par le rapport du colonel Courtois depuis avril 2005 est une voie légale mais « il y a un décret qu’il faut modifier », a dit le Préfet. Le décret de 93 comporte en effet des éléments qui ne peuvent s’appliquer aux volontaires du SDIS réunionnais, créé en 2000.
« Si une nouvelle voie légale s’ouvre à eux, il faudra tout de même qu’ils se préparent aux épreuves. Ce ne sera pas l’école des fans » a ajouté le colonel Carolis. Tous admettent que cette préparation a été déficiente pour le concours 2007.
Il se dégage de la crise ouverte actuelle - dont rien n’indique d’ailleurs qu’elle est en voie de règlement - une ambiguïté malsaine : tout en reconnaissant l’urgence de réorganiser le SDIS, on a joué le pourrissement pour les pompiers permanents, qui sont pour beaucoup d’authentiques pompiers, hors statut. Et depuis trop longtemps pour qu’on les mette en compétition avec des jeunes entrant dans la carrière. Il y a une solution humaine et politique à trouver.
Les dirigeants actuels ont-ils véritablement la volonté de faire aboutir ce dossier ? Ou leur façon de se réfugier derrière un légalisme désincarné est-elle une forme de fuite devant la réalité sociale et politique réunionnaise ?

P. David

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Intervention du Préfet

Sous la menace d’une dissolution

« Mauvaise gestion », « dysfonctionnements graves... », ce diagnostic du Préfet Pierre-Henry Maccioni recoupe celui de la Chambre régionale des comptes qui, dans son rapport de janvier 2007, fait part de son inquiétude « quant aux conditions d’organisation et de fonctionnement du SDIS et, principalement quant à ses capacités à répondre aux missions opérationnelles qui sont les siennes ». Au passage, le Préfet observe que les conclusions des missions d’inspection de 1999 et 2004 « sont restées lettres mortes ».
Le Préfet fustige « le clientélisme [qui] a détourné le SDIS de son objectif légal » et « comprend » la situation des pompiers “permanents”, qu’il appelle « des pompiers du troisième type » sans proposer de solution adaptée. « ... L’État soutient le Conseil Général dans les initiatives qu’il prend afin de déboucher sur une solution honorable et conforme à l’intérêt général », dit-il tout en constatant l’échec du concours. En renvoyant dos-à-dos la direction du SDIS « qui n’a pas évalué correctement la capacité d’intégration d’un concours au regard du profil des agents concernés » et « quelques personnes pas toujours directement concernées par l’enjeu, qui ont conduit à l’impasse ceux qui les ont suivis », le Préfet ne clarifie rien. Ces niveaux de responsabilité seraient-ils équivalents ?
Il indique aussi que, loin de contribuer à régler le problème des permanents, le concours a créé un nouveau problème : celui des lauréats du concours « qui ne comprendront certainement pas qu’on ne les intègre pas, alors qu’on maintient sur des emplois budgétaires de sapeurs professionnels des agents de services techniques ayant échoué ou refusé le concours. Il faudra donc certainement créer de nouveaux emplois budgétaires en conséquence ». C’est la Cour régionale des comptes qui va être contente...
Après avoir ainsi opposé les catégories de pompiers entre elles, les appels à « renouer le dialogue social » sonnent un peu creux...

P. D.


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