UNEDIC : La mobilisation enfle de jour en jour

Unanimité des syndicats pour la réintégration des “recalculés”

29 avril 2004

À l’issue de la réunion de mardi à l’UNEDIC, l’ensemble des syndicats a souhaité la réouverture de négociations sur l’assurance chômage, et unanimement désormais, la réintégration des “recalculés”. Le MEDEF a refusé de s’avancer sur le sujet. Et le gouvernement a clairement fait savoir qu’il était prêt à s’engager dans le dossier si aucune « solution heureuse » ne pouvait être trouvée par les partenaires sociaux dans les tous prochains jours. La partie n’est pas gagnée. Plus que jamais, la mobilisation est nécessaire.

Le ministre de l’Emploi et de la Cohésion sociale, Jean-Louis Borloo, dévoilait ses cartes mardi à l’Assemblée nationale concernant l’affaire des chômeurs privés de leur indemnisation. Répondant à un député, il expliquait : "les partenaires sociaux, d’ici à la fin de la semaine ou en début de semaine prochaine, trouveront une solution heureuse" au problème actuel. Et dans le cas contraire, il affirmait que le gouvernement était prêt à agir.
Une déclaration faite au moment où ces mêmes partenaires sociaux, siégeant à l’UNEDIC, se réunissaient pour examiner les conséquences financières de la décision prise le 15 avril dernier par le tribunal de Marseille, condamnant les ASSEDIC à verser aux “recalculés” les sommes qui leur avaient été injustement enlevées.
Les positions de chacun des partenaires commencent à se dessiner.
Le MEDEF ne veut pas entendre parler d’une quelconque renégociation de la convention actuelle. Par ailleurs, il a rejeté fermement toute proposition de relèvement des cotisations. Et essentiellement des cotisations patronales.
La position des syndicats de salariés est bien évidemment différente, tout en n’étant pas unitaire sur les moyens de la sortie de crise.

Préoccupation de gestionnaire

En particulier, aujourd’hui, les positions des trois syndicats signataires de la convention de décembre 2002 pénalisant les chômeurs divergent quelque peu sur les solutions “financières”.
Par exemple, le président de la CFTC, tout en estimant que l’UNEDIC doit procéder très rapidement au "rétablissement de la durée initiale d’indemnisation", accompagne sa position d’une préoccupation de gestionnaire : mettre en place "une surcotisation temporaire, autour de 0,1 à 0,2%". Et là où cela devient problématique, c’est la répartition proposée : "à hauteur des deux tiers par les entreprises et d’un tiers par les salariés".
Du côté de la direction nationale de la CGC, là aussi, dans un souci d’équilibre de finances, on propose que l’UNEDIC fasse un "emprunt supplémentaire". L’organisme avait déjà emprunter et rien ne laisse envisager qu’elle puisse, à nouveau emprunter, d’autant plus que son déficit se creuse et que les perspectives d’une baisse du taux de chômage sont très réduites.
Troisième signataire de la convention de 2002, la direction nationale de la CFDT, qui voudrait elle aussi voir les “recalculés” être rétablis dans leurs droits initiaux. Elle devrait être plus explicite après la tenue de son Bureau national. Mais d’après les premières déclarations recueillies, elle voudrait que si renégociation il y a, cela se fasse avec le MEDEF. La direction nationale de la CFDT demande en effet "d’ouvrir une renégociation de l’accord de décembre 2002 afin de trouver de nouveaux financements". La justification vaut ce qu’elle vaut.

Renégociation ?

Les directions nationales de ces trois organisations syndicales (CFDT, CFTC, CGC) rejoignent donc les positions de la CGT et de FO. Celles-ci avaient dénoncé la renégociation de décembre 2002 (voir en encadré) .
Mais les trois syndicats signataires réfléchissent à des solutions pour sortir de la “crise”. Le MEDEF et le gouvernement travaillent aussi sur la question.
Les propositions aujourd’hui formulées, quelles qu’elles soient, sont susceptibles d’être “performantes” à court terme seulement. La question de fond, récurrente, sera inévitablement posée à nouveau, dans quelques mois.
La question urgente est donc celle-ci : Va-t-on parvenir à une renégociation de l’accord de 2002 ? Ce n’est donc pas encore totalement certain, notamment au vu de l’intransigeance du MEDEF, et ce malgré les appels du pied que lui fait le gouvernement et l’unanimité syndicale aujourd’hui retrouvée.
Le président de l’UNEDIC, Denis Gautier-Sauvagnac (MEDEF), a d’ailleurs clairement affiché sa position : "pour le moment, nous avons les moyens d’assurer la continuité de l’indemnisation des chômeurs jusqu’au moment où d’autres décisions seraient prises". En clair, pas question de verser ce qui leur est dû aux “recalculés”.
Pour certains syndicats, si le MEDEF ne réagit pas à leur demande de négociation, ils ont décidé de demander "au gouvernement de prendre un décret, et ce avant la décision du Conseil d’État".
Le gouvernement va-t-il retirer l’agrément de cette convention et provoquer la négociation, par toutes les parties concernées, d’un nouveau système d’indemnisation ? Pour l’instant, on n’en sait rien. Et le gouvernement se garde bien de communiquer sur la question. Probablement dans l’attente de la réponse du conseil d’État.
Toujours est-il que cette renégociation, si elle voyait le jour, ne permettrait pas aux salariés devenus chômeurs au 1er janvier 2003 de jouir des droits “anciens”. Il y a encore là une belle question juridique - et morale - sur laquelle il conviendra de travailler.

Dossier : Dominique Besson


Quelle sortie de crise ?

Échéances et propositions

Il y a maintenant unanimité syndicale pour demander la réintégration des “recalculés” dans leurs droits légitimes. Mais la partie s’annonce serrée, au vu des échéances qui pourraient encore plus troubler cette partie très confuse...

Il y a des échéances importantes. À commencer par la décision que prendra, le 7 mai, le Conseil d’État. Celui-ci a été saisi par les comités de chômeurs qui ont déposé un recours contre ce fameux accord de décembre 2002.
Deuxième échéance importante : le 11 mai. C’est ce jour-là que le tribunal de Paris se prononcera sur la plainte de 24 autres chômeurs “recalculés”. Et chacun est dans l’attente des décisions prises dans les 65 autres juridictions de France métropolitaine, décisions qui devraient être rendues au fil des jours, en mai voire en juin : à Angers, par exemple, le jugement sera rendu le 22 juin.
Par ailleurs, au 27 avril, 20 Assedic sur 31 sont concernées par des dépôts de plaintes, lesquelles ne cessent de s’accélérer.
Autre échéance en juin : celle de la cour d’appel de Aix en Provence, qui a été saisie par les Assedic de PACA, suite à la décision du TGI de Marseille.


Mobilisation à La Réunion

Échéance importante pour La Réunion : le 7 juin. Les “recalculés” réunionnais qui ont déposé plainte sauront si, oui ou non, ils sont rétablis dans leurs droits.
Mais il y a une autre échéance : celle du premier mai. En effet, l’intersyndicale CGTR-FSU-UNSA appelle à une mobilisation à Saint-Pierre.
Et chacun sait bien que la mobilisation reste encore le meilleur moyen pour obtenir la généralisation de la victoire des "recalculés" marseillais pour tous les "recalculés", notamment réunionnais.
Au cœur des nombreuses revendications donc : la question de l’indemnisation du chômage, tant pour les “recalculés” que pour les intermittents. Mais aussi la question des retraites. La question du transfert des personnels TOS...
Sans compter la “réforme” de l’assurance maladie. Ou la mise en place du “plan pour l’emploi”. Ou la suppression d’un jour férié pour financer d’autres plans. Ou l’abandon des plans de rattrapage. Ou la baisse inexorable des budgets nationaux (dont ceux consacrés à l’éducation, au logement, à l’emploi...). Bref des attaques sociales extrêmement graves mais qui auront des conséquences encore plus dramatiques à La Réunion et dans l’outre-mer.
Il y a 1.000 raisons d’être présent à Saint-Pierre, le 1er mai.


La renégociation de 2002

C’est cette convention datant de la renégociation de décembre 2002 qui est aujourd’hui mise en cause. Cette renégociation avait pour objectif d’éviter des “dérapages” financiers trop importants, (estimés à 15 milliards d’euros). Seuls trois syndicats - outre le Medef -, l’avaient signé : CFDT, CGC, CFTC.
Lors de cette renégociation, il avait été décidé d’une part d’une hausse de 10% des cotisations (augmentation des taux des cotisations de 5,8% à 6,4%, pour un “rendement” de 6,75 milliards d’euros), et d’autre part d’un raccourcissement de 30 à 23 mois de la durée d’indemnisation. Le raccourcissement des droits, à partir du 1er janvier 2004, pour les chômeurs indemnisés au 1er janvier 2003, faisait réaliser à l’Unedic une “économie” de 2 milliards d’euros, mais cela représentait un effort de 4,5 à 5 milliards d’euros pour les demandeurs d’emploi entrés en indemnisation après le 1er janvier 2003.
Conséquence de cette renégociation 2002 : un privé d’emploi indemnisé sur quatre était frappé de plein fouet par des mesures d’une injustice sociale énorme.


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