Association FANAL à Saint-André

Une nouvelle épicerie sociale va naître

2 août 2007, par Edith Poulbassia

L’Est en avait besoin. La seule épicerie sociale Epi Est à Saint-Benoît ne peut prendre en charge toutes les familles en détresse. La toute jeune association FANAL (Foyer d’accueil des nouvelles actions sociales dans l’Est) projette d’ouvrir une structure du même genre à Saint-André en novembre. Son Président, Sully Mardenalom, nous en dit plus sur cette lutte contre la pauvreté qu’il veut mener.

Sully Mardenalom, vous êtes Directeur général adjoint à la Mairie de Saint-André et Président de l’association FANAL. FANAL, qu’est-ce que c’est ?

- FANAL est une association loi 1901 qui ne compte pour l’instant que 15 membres. Le bureau a été installé il y quelques semaines. Nous avons pour l’instant 2 projets, c’est-à-dire la mise en place d’une épicerie sociale à Saint-André et la création de régies de quartier. Mais plus largement, FANAL veut lutter contre la pauvreté. C’est un objectif ambitieux, voire utopique, mais si on ne commence pas, jamais on ne pourra avancer. Pour nous, sortir de la pauvreté, ce n’est pas seulement pouvoir bien manger, bien boire, mais c’est aussi retrouver une structuration du lien social. Ce n’est pas normal qu’il y ait de la mésentente dans les familles, que les couples volent en éclats. Beaucoup de valeurs se perdent aujourd’hui, c’est pourquoi il est important de recréer le lien social dans les quartiers. J’ai vécu en Métropole, notamment à Montpellier, où j’ai suivi des études. Là-bas, j’ai créé des comités de voisinage pour que les gens apprennent à mieux se connaître. On commence par boire un verre ensemble et puis on peut rendre service à son voisin s’il en a besoin. Un petit geste ne coûte rien. Prenons le cas des personnes âgées, qu’il nous arrive de jeter comme du linge sale. Il est facile de les aider par des gestes simples au quotidien. Les jeunes que l’on traitent souvent de délinquants, et je ne suis pas d’accord avec cette vision, sont capables d’aider à condition d’être soutenus. Qu’est-ce que ça coûte d’aller chercher un morceau de pain le matin pour un gramoun ? Ou de lui installer une bouteille de gaz ? Ces petites choses de la vie quotidienne se perdent dans notre société créole. Ce serait d’ailleurs un moyen de créer des emplois de proximité, des emplois de terrain.

Lutter contre la pauvreté, c’est en effet un programme ambitieux. Où en êtes-vous concrètement dans l’avancement des projets de l’association ?

- Nous avons mis en place le bureau de l’association, les réunions ont permis de fixer les grands axes, dont 2 principes directeurs que sont la dignité et le respect de l’autre. FANAL devrait bientôt disposer d’un local au centre commercial de Saint-André, et donc d’un numéro de téléphone. Pour l’épicerie sociale, j’ai déjà pris contact avec les grandes surfaces qui pourront nous fournir les produits. Nous fonctionnerons aussi grâce à un système de banque alimentaire, les gens peuvent donc faire des dons. L’épicerie devrait ouvrir ses portes d’ici novembre. Pour les régies de quartier, c’est plus long à mettre en place.

Une nouvelle épicerie sociale répond-t-elle à un vrai besoin dans l’Est ?

- Oui, bien sûr. Epi Est existe à Saint-Benoît, mais la capacité d’accueil est limitée. Uniquement à Saint-André, environ 3.000 familles peuvent être concernées. Essentiellement une population au RMI ou qui vit de minima sociaux. On sera toutefois dans l’obligation de sélectionner les personnes en fonction de leur situation. L’épicerie sociale sera une petite surface où il y aura des produits alimentaires et d’hygiène dans les rayons. Une personne qui touche 300 euros de retraite par mois ne peut pas se permettre d’aller dans un supermarché. Les produits seront beaucoup moins chers à l’épicerie sociale. Mais la personne fera ses courses comme tout le monde : le choix des produits, le passage à la caisse, le règlement. De cette façon, nous préservons la dignité de la personne. Nous sommes contre l’assistanat. Comme on dit, il vaut mieux apprendre à quelqu’un à pêcher que de lui donner du poisson tous les jours. De cette façon, les familles vont pouvoir mieux gérer leur budget. Pour moi, les chômeurs et les érémistes sont des victimes de la société. On a tendance à l’oublier. L’épicerie sociale sera là pour rétablir les droits mais aussi les devoirs de ces gens.
FANAL veillera à ce qu’il n’y ait pas d’abus.

« On manque de militants sociaux »

Vous avez évoqué la mise en place de régies de quartier. A quoi peuvent-elles servir ?

- A créer un partenariat social pour la gestion du quartier par les habitants eux-mêmes. Les gens doivent se sentir responsables de leur environnement, s’approprier leur lieu de vie. Le rôle des régies de quartier, c’est de réunir les habitants pour régler des problèmes, que ce soit d’aménagement, de voisinage... C’est une façon de faire remonter aussi les informations à la mairie.

FANAL va-t-il s’occuper uniquement de Saint-André ?

- Dans l’immédiat, oui. Le temps que les projets prennent forme. La pauvreté n’a pas de frontières, l’association FANAL peut être intercommunale. Il semble qu’il y ait une grosse demande par exemple à Sainte-Suzanne, où Epi Est n’est pas en mesure de gérer seule. FANAL pourrait à l’avenir ouvrir une épicerie sociale à Sainte-Suzanne. Je ne suis pas sectaire.

Pourquoi avez-vous choisi une association pour mener ce combat contre la pauvreté ?

- Je trouve que les élus, de droite comme de gauche, investissent beaucoup dans le Bâtiment, dans des grands travaux. C’est bien, mais on oublie d’investir dans l’humain. On oublie l’Homme qui, pourtant, est central. L’association me semble plus appropriée pour intervenir dans ce domaine. C’est vrai, il existe des services sociaux au Département, dans les communes, mais à mon avis, ils ne sont pas assez réactifs, et ne suivent l’évolution des familles ou des personnes qu’à court terme. Une association a plus de pouvoir pour réagir. Elle n’a pas à se poser la question des dossiers, du financement, elle peut se battre, mener une sorte de révolution dans le social. Car chacun peut être bénévole, chaque individu peut se mobiliser contre la pauvreté, faire preuve de solidarité. Mais il n’y a pas assez de militants sociaux...

Oui, c’est vrai... Mais alors comment comptez-vous faire pour mobiliser les gens dans les quartiers ?

- Eh bien, regardez... (difficile, en effet, de poursuivre l’entretien sans être interrompu !). Les habitants me connaissent à Saint-André, j’entretiens les liens, je les sensibilise à cette lutte. J’ai aussi une autre association, l’ASVSA (Association sportive de volley de Saint-André) et un journal qui s’appelle “Lastik”.

Où trouvez-vous la motivation nécessaire à ce genre de projet ?

- Il n’y a pas plus grand bonheur que d’aider l’autre. Et je crois que l’on peut toujours trouver des solutions si on sait s’entourer de personnes qui dégagent des énergies positives.

Propos recueillis par Edith Poulbassia


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