Pour les allocataires de minima sociaux cette année :

« Une prime exceptionnelle » en plus de celle de Noël

22 novembre 2008, par Risham Badroudine

Eric Woerth, ministre du Budget, l’avait annoncé en septembre dernier : pour « rattraper le décalage de l’inflation », les allocataires de minima sociaux, notamment les personnes relevant du RMI, bénéficieront cette année d’une prime exceptionnelle, en complément de la “Prime de Noël”.

A La Réunion, ce sont plus de 67.000 bénéficiaires du RMI qui toucheront cette aide exceptionnelle.
Ainsi, une personne seule, allocataire du RMI, percevra une Prime de Noël de 152,45 et une prime exceptionnelle de 67,55 euros. Cette somme forfaitaire soulève 2 problèmes d’injustice. La précarité interpelle le monde économique.

Majoration progressive en fonction de la taille du foyer

Tout d’abord, le RMI est attribué suivant la taille de la famille, en tenant compte de frais réels de survie. Par exemple, une personne seule perçoit moins qu’un couple qui lui-même reçoit moins qu’un couple avec enfant... C’est une question de justice. La Prime de Noël tient compte de cette réalité. Mais lorsque le gouvernement forfaitise la « prime exceptionnelle » à 67,55 euros, il crée une injustice. En effet, si la vie est chère, elle l’est pour tout le monde. Si l’objectif est de couvrir les dépenses supplémentaires liées à l’inflation, les foyers à 2 personnes et plus auraient dû obtenir beaucoup plus que 67,55 euros. La majoration aurait dû être progressive.

Une majoration insuffisante au vu du coût de la vie à La Réunion

Ensuite, le montant attribué a été calculé en fonction des réalités françaises. Or, à La Réunion, les prix sont 2 fois plus élevés, c’est-à-dire qu’à valeur constante, le pouvoir d’achat de 67,55 euros ne représente, en fait, que la moitié du “caddy” de la ménagère française. Dès lors, l’égalité entre citoyens de la République, issue du vote du 19 mars 1946, est trahie. Le manque à gagner est important pour les familles ainsi que pour l’économie générale de La Réunion.
Rappelons que dans notre île, 52% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté. C’est après plusieurs années de lutte, qui est d’ailleurs passée par la démission de nos deux députés Paul Vergès et Elie Hoarau en 1986, que les prestations sociales ont été alignées à La Réunion sur celles servies en France.
En 2007, plus de 140.000 Réunionnais perçoivent au moins un des minima sociaux. Le nombre de personnes couvertes (allocataires et leurs familles) par ces prestations représente 274.502 personnes en 2007, soit le tiers de la population réunionnaise. Le montant des prestations versées en 2007 se stabilise autour de 755 millions d’euros. L’allocation moyenne est de 442 euros, rappelons aussi qu’en termes de pouvoir d’achat, le coût de la vie est supérieur à La Réunion par rapport à la France continentale).
En 2007, le montant global des prestations de protection sociale distribuées aux ménages réunionnais s’élève à plus de 4,7 milliards d’euros. Elles croissent de 4,3%.

Evolution du montant total des prestations de protection sociale à La Réunion en milliards d’euros

2003 2004 2005 2006 2007
3,9 4,16 4,33 4,52 4,72

Grâce à l’action politique des communistes et d’autres forces sociales, c’est donc d’une somme importante que bénéficie l’économie réunionnaise. Cette situation interpelle tout le monde économique.

Investir localement afin de créer des emplois

En effet, il est dommage que les acteurs économiques réunionnais n’utilisent pas cette somme pour réinvestir, créer de la valeur ajoutée localement, et donc des emplois, seul moyen pour sortir les érémistes de la précarité. Tout se passe comme si le monde économique profitait d’une rente qui dure depuis plus 20 ans !
Actuellement, cette somme quitte le circuit économique local essentiellement par le biais de l’importation. En 2007, le déficit de notre balance commerciale a atteint un record de 3,7 milliards d’euros. L’île a importé pour près de 4 milliards d’euros de marchandises.
La grande distribution fait donc main basse sur l’argent des pauvres et le travail des élus. Si cet argent avait été utilisé pour être réinvesti localement, cela aurait permis la création d’activités et la fabrication de produits qui sont susceptibles de générer des emplois pour sortir les précaires de la misère.

Risham Badroudine


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