France Télécom devant la justice

Y aurait-il une justice péi ?

25 janvier 2007

La direction de France Télécom devrait comparaître ce matin à 10 heures devant le Tribunal de Grande Instance de Champ Fleuri pour “travail illégal le dimanche”. Constatant que les autorités à même de faire cesser cette violation caractérisée de la loi ne réagissaient pas, la fédération Sud-PTT a décidé de saisir la justice « pour que La Réunion ne soit pas hors des chemins de la République. »

Le 17 décembre dernier, le secrétaire départemental de la fédération syndicale des activités postales et de télécommunications, Daniel Béton, accompagné de son avocat Maître Mickael Nativel, expliquait à la presse : « Nos dirigeants sont actuellement hors la loi. »

«  En ces temps de libéralisme à outrance...  »

En effet, depuis plusieurs mois, France Télécom s’autorise l’ouverture dominicale de quatre de ses boutiques implantées dans des grandes surfaces de l’île. Condamnée à plusieurs reprises en métropole pour des faits similaires, l’entreprise de téléphonie trouve à La Réunion un terrain d’impunité qui lui permet d’enfreindre de façon avérée le Code du travail sans en être inquiétée. France Télécom n’ayant sollicité aucune dérogation individuelle auprès du Préfet comme la procédure l’exigerait (certainement parce que ses chances de l’obtenir sont quasi nulles), la jurisprudence devrait s’appliquer. Oui, mais...
Le 27 juin 2006, Sud PTT dépose alors une plainte auprès du Procureur de la République. Enregistrée 3 mois après, le 21 septembre, elle restera sans suite. L’Inspection du Travail, interpellée à son tour, constate l’illégalité et notifie à la direction par courrier du 21 août, les risques financiers et pénaux qu’elle encourre. Elle aurait pu elle-même saisir en référé le président du Tribunal de Grande Instance, mais elle ne mettra pas ses menaces à exécution. Un avertissement sans conséquence. Face à l’immobilisme ambiant, alors que la direction de France Télécom tente de convaincre la fédération d’éviter les remous, Sud-PTT fait appel à un avocat, en la personne de Maître Mickael Nativel. Ce dernier choisit « la voie la plus opportune » et saisit donc en référé France Télécom devant le président du Tribunal de Grande Instance. Par des délais de procédure, l’entreprise a échappé à sa première comparution fixée le 28 décembre dernier et reportée donc à ce matin. « Si c’est reporté encore cette fois, cela ne le sera pas éternellement », concède avec philosophie Daniel Béton. Le Préfet qui est compétent pour exiger la fermeture de ces boutiques le dimanche, n’a toujours pas réagi. « En ces temps de libéralisme à outrance, la tendance est plus favorable à l’ouverture », souligne le syndicaliste. Quant aux salariés concernés, les intérimaires, majoritaires, s’ils veulent garder leur poste, ont tout intérêt à garder le silence, alors que « les jeunes en CDI sont tellement mal payés que travailler le dimanche leur fait un petit pécule en plus », comprend Daniel Béton qui qualifie la situation d’« assez compliquée. »

Qu’importe le temps qu’il faudra, la fédération qui plaide en faveur d’« une seule justice pour tous » se dit déterminée à mener ce « combat juste » à son terme. Elle doit se sentir pourtant un peu seule dans cette bataille. Elle souhaite aussi par son action interpeller le monde politique et plus largement l’opinion publique. Son engagement devrait nous questionner : Quelle société voulons-nous ? Quelles conditions de travail demain pour nos enfants ? La lutte contre le travail illégal accepte-t-elle des exceptions ? Jusqu’où peut aller le pouvoir des lobbies et les revers de la société de surconsommation ? Pourquoi les sanctions ne sont-elles pas automatiques pour tout le monde ?...

Stéphanie Longeras


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?

Messages

  • La dérive "république bananière" s’accentue à La Réunion qui devient un laboratoire d’essaie pour les néolibéraux de tous poils, avec la complicité de l’administration, il est encore possible de réagir mais il faut faire vite


Témoignages - 80e année


+ Lus