Contribution du Conseil régional et du Conseil général relative aux États-généraux de l’Outre-mer — 8 —

Synthèse des propositions adoptées par les deux assemblées réunionnaises

18 septembre 2009

La conclusion du document présentant les propositions de la Région et du Conseil général synthétise les différentes parties de cette importante contribution à un plan réunionnais de développement.

Le document de synthèse des États-généraux à La Réunion a proposé de placer « le développement humain au cœur du projet stratégique de La Réunion » en l’illustrant des actions suivantes : un Plan Marshall du logement social et de relance du BTP, la réalisation d’un GERRI social, de l’UniverCité de Tous les Savoirs et de la Maison des civilisations et de l’unité réunionnaise, la mise en oeuvre « d’un système de gestion globale des eaux, de DEFI pour la sécurité alimentaire, et de DBE pour l’autonomie énergétique, la création à La Réunion d’une compagnie maritime régionale, et l’installation de Bio-Data-Centers, la création d’une plate forme de coopération régionale et d’ingénierie pour la gouvernance et l’évaluation des politiques publiques ».
Ce document légitime certaines actions entreprises par les collectivités mais ne peut suffire à répondre à une situation que le Président de la République a qualifié de « crise sociale, crise des structures, crise identitaire et donc politique… » .

Il est donc nécessaire de mieux préciser le contexte, les enjeux et les orientations stratégiques qui correspondent à la situation actuelle et aux perspectives de développement de La Réunion.


I/ Répondre à la crise et à l’urgence sociale

En premier lieu, l’importance des impacts de la crise mondiale ne doit pas être sous-estimée : La Réunion a eu, en 2008-2009, ses plus mauvais résultats économiques depuis 12 ans amplifiant une situation déjà très marquée par les inégalités et la pauvreté.
Face à cette situation, il faut réévaluer d’urgence et de façon partenariale l’efficacité des dispositifs mis en place et l’application des mesures obtenues par le mouvement social : les menaces sur l’emploi de près de 2.000 assistants d’éducation, les plaintes renouvelées des TPE/PME sur les difficultés rencontrées auprès des banques… montrent le décalage entre les annonces et la réalité. Parallèlement, pour le BTP et les secteurs liés qui sont très réactifs à la commande, l’accélération de la mise en œuvre des grands chantiers, à l’exemple du nouveau pont de la Rivière Saint-Étienne ou du choix du groupement en charge du Tram-train, est primordiale.
Et au niveau des minima sociaux, l’avancement des dates de paiements de certaines allocations et le resserrement du calendrier d’extension du RSA s’imposent.


II/ Veiller à l’adaptation des réformes en cours

En second lieu, il convient de veiller à l’adaptation des réformes et autres processus en cours à la situation réunionnaise.
Il en est ainsi des négociations à partir de 2010 des futures politiques européennes qui viendront à échéance en 2013/2014 : politique agricole avec le dossier sucre, politique régionale avec les Fonds structurels, pêche, octroi de mer, APE… Si la démarche de la Conférence des Présidents des RUP doit se poursuivre et être soutenue, un séminaire entre le Gouvernement, les Présidents des Collectivités locales et les Parlementaires européens de l’Outre-mer permettrait une meilleure coordination des différents acteurs institutionnels de l’Outre-mer français.

De même, les réformes nationales en discussion (Réforme de la Taxe professionnelle, création de la taxe carbone, réforme de l’organisation territoriale, Rapport Hirsch, Grenelle de la mer, Assises de la pêche…) vont impacter le développement de La Réunion et interférer avec le processus des États-généraux. La tenue d’une Conférence des Éxécutifs locaux de La Réunion et du Gouvernement avant la tenue du Conseil Interministériel qui doit clôturer les États-généraux est nécessaire pour adapter ces réformes aux réalités locales.


III/ Proposer une nouvelle étape du développement durable

La crise et l’évolutivité des contextes extérieurs renforcent la nécessité d’une nouvelle étape pour le développement durable de La Réunion à l’horizon 2025/2030.
Ce plan exige une vision globale qui, à la fois, se nourrit des enseignements de l’Histoire de La Réunion et s’inscrit pleinement dans le contexte des enjeux du 21ème siècle. L’évolution démographique de La Réunion, comme celle des États et territoires les plus proches, inscrit son avenir dans un contexte opposé au déclin (démographique) européen. Enfin, son statut de région française ultrapériphérique de l’Union européenne confère à La Réunion une place particulière dans cet océan Indien qui est sans doute l’océan cumulant le plus d’enjeux stratégiques mondiaux.

Ainsi, à côté des défis quotidiens d’une société réunionnaise très inégalitaire ces données, placent les questions prioritaires de la cohésion sociale, de la sécurité alimentaire, de l’autonomie énergétique et de la dimension maritime au centre des enjeux. Cette nouvelle étape doit plus que jamais s’inspirer des valeurs de dignité et de solidarité et permettre une création suffisante d’emplois destinés prioritairement aux Réunionnais.

À cette fin, la nouvelle étape dans ses dimensions humaine, économique et territoriale, doit se baser sur les orientations suivantes et les actions les plus notables qui s’y rattachent.

En matière de développement humain :

le renforcement de la cohésion sociale avec la création d’un grand service public à la personne, la maîtrise de l’illettrisme ; un contrôle des prix plus efficient ; un dialogue social amélioré par une réorganisation des branches et l’extension des conventions nationales ;

la promotion de la jeunesse réunionnaise avec une priorité à l’emploi aux jeunes Réunionnais de plus en plus qualifiés et diplômés, l’amélioration des performances du système éducatif, la prise en compte pédagogique de l’identité réunionnaise, la mise en place de l’Université de l’océan Indien ;

l’affirmation de l’identité réunionnaise en intégrant pleinement la dimension culturelle dans la démarche de développement, la valorisation du patrimoine, le soutien à la mobilité culturelle et par la réduction de la fracture numérique ;

En matière de développement économique :

l’autonomie énergétique par un changement de modèle énergétique dans le domaine des transports, et le développement de tout le potentiel d’énergies renouvelables : biomasse, solaire, éolien, océanique… en lançant une nouvelle étape avec le projet STARTER (STratégie pour l’autonomie énergétique, la relance et la transition de l’économie réunionnaise).

la sécurité alimentaire par le soutien aux produits locaux, la solidarité des filières et des différents acteurs, la consolidation de l’agro-nutrition en milieu tropical comme pôle de compétitivité, le développement de la pêche et de l’aquaculture dans un cadre régional ;

l’ouverture au monde et le co-développement durable en priorisant le domaine maritime comme un espace privilégié de coopération au sein d’une Conférence maritime régionale, en recherchant les complémentarités en matière de sécurité alimentaire, en créant une compagnie maritime régionale, en consolidant des réseaux TIC, et la désignation de la Région comme chef de file ;

En matière de développement territorial :

la protection du territoire par la création d’un grand service public de proximité pour l’environnement, l’expérimentation de solutions alternatives concernant les eaux usées, par le plan d’aménagement hydraulique de La Réunion ;

l’urgence du logement social avec la construction d’ici à six ans de 30.000 logements sociaux à prix accessible, la mobilisation financière et l’adaptation réglementaire nécessaires ;

la maîtrise de l’organisation urbaine par la structuration de l’aménagement autour de grandes réalisations comme le Tram-train, la limitation de l’étalement urbain, le développement des transports propres et des autres modes de circulation les moins polluants, l’organisation d’un réseau de pôles économiques primaires et secondaires.


IV/ Rénover la gouvernance et garantir les ressources

Cette nouvelle étape ne peut se concevoir sans un mode de gouvernance rénové, ni une garantie de ressources. L’enjeu pour La Réunion est, en effet, de se doter d’une gouvernance efficiente répondant aux multiples enjeux auxquels elle est confrontée et prenant en compte sa triple intégration à la France, à l’Europe et à son environnement géopolitique et économique.

Le Président de la République a souhaité que chaque collectivité d’Outre-mer détermine le schéma de gouvernance qui lui soit le plus approprié.

L’avant-projet de loi issu de la réflexion engagée par la commission Balladur propose une réorganisation territoriale à l’échelle de la Métropole. La perspective d’émergence de grandes régions transcendant les limites régionales et départementales actuelles répond à la nécessité pour la France de se doter d’entités de taille à affronter les enjeux liés à la construction européenne.

Il appartient donc aujourd’hui aux Réunionnais, et notamment au Conseil régional et au Conseil général, de formuler leurs propositions.
Doit-on aller vers une seule Assemblée fusionnant les compétences de la Région et du Département ou doit-on privilégier le maintien de cette situation de cohabitation de deux assemblées sur un même territoire de 2.500 km2 et de 800.000 habitants ? L’exercice d’harmonisation des compétences engagé par les deux collectivités a-t-il permis d’effacer toute situation de conflits ou d’éparpillement de compétences sur un territoire soumis à des contraintes en interaction permanente ? Les exigences du développement ne plaident-elles pas au contraire pour une seule Assemblée assumant la responsabilité de la conduite d’une politique globale et cohérente et exerçant les compétences stratégiques correspondantes ?

En toute hypothèse, l’esprit de la réforme Balladur invite à une évolution du paysage des collectivités territoriales dans notre République décentralisée. La discussion sur le projet de loi issu de la “réforme Balladur” déterminera le rythme et le degré de cette évolution.

La question de la gouvernance va toutefois au-delà de cette problématique pour envisager celles des compétences et des ressources.

L’article 73 de la Constitution, l’article 299-2 de l’Union, le droit à l’expérimentation prévu par la Constitution permettent des possibilités d’adaptations qui mériteraient d’être mieux exploitées au bénéfice des Départements d’Outre-mer. Certaines compétences stratégiques (coopération régionale, énergie, pêche…) doivent être transférées par l’État à l’échelon territorial le plus approprié.
Des compétences éclatées ou fissurées entre collectivités peuvent être confiées à une seule collectivité : routes et déplacements, déchets, eau, éducation…

Du point de vue des ressources financières, la faiblesse du potentiel fiscal local, l’impact de la crise sur ce type de ressources, le risque d’une baisse des concours financiers externes après la période de programmes contractuels actuels s’opposent à l’ampleur des besoins liés aux retards d’équipements, à la démographie, et à la nécessité d’une nouvelle étape de développement.

À ce sujet, il est au préalable impératif d’apurer les contentieux financiers sur les transferts de compétence et de diligenter à ce sujet une mission d’expertise indépendante.

Tout aussi indispensable est la consolidation des recettes de l’Octroi de mer et de la Taxe Spéciale sur la Consommation des Carburants.

Innover, faire émerger de nouvelles ressources et mieux utiliser les ressources existantes est absolument nécessaire. La réflexion doit porter notamment sur les possibilités de taxation des plus values foncières et des jeux de hasard, sur l’adaptation d’une « fiscalité verte » à la situation locale.

Par ailleurs, le Rapport d’information du Sénat, les ateliers des États-généraux, dans la continuité de la réforme par le Gouvernement de certaines majorations de retraites Outre-mer, posent la question des rémunérations du secteur public. Ce sujet ne peut être abordé que dans le respect de certains principes : application d’une réforme éventuelle aux seuls futurs recrutements et affectations à La Réunion avec maintien impératif des avantages acquis pour les agents en poste, large concertation et neutralité budgétaire pour l’économie locale.

Enfin, La Réunion devrait bénéficier du grand emprunt national destiné à financer des “projets d’avenir” pour soutenir la volonté réunionnaise de réussir un modèle exemplaire de développement durable.

Afin que ces premières propositions et orientations soient concrétisées, il est impérieux que de vrais “Accords” soient passés entre le gouvernement et nos assemblées. Ils devraient prévoir, sous la forme d’un contrat, leurs déclinaisons opérationnelles et les mesures associées, leur financement et le calendrier correspondant.


Les détails des propositions

Dans ces dernières éditions, "Témoignages" a reproduit intégralement le document conjoint présenté par la Région et le Département. Voici les différentes dates de parution.


- 09 septembre : présentation de la synthèse locale des États Généraux.

- 10 septembre : des orientations partagées et des actions engagées.

- 11 septembre : des préalables à la mise en œuvre d’un plan de développement durable.

- 12 septembre : les enjeux clés et les propositions pour le développement humain.

- 14 septembre : le développement économique.

- 15 septembre : le développement territorial.

- 16 septembre : La Gouvernance : organisation administrative, cadre juridique et compétences.

- 17 septembre : La Gouvernance : les ressources des Collectivités.

L’intégralité du document présenté lors des dernières séances plénières des deux assemblées et adressé au gouvernement est consultable sur le site web de Témoignages — http://www.temoignages.re.

Pour un accès direct, une adresse :
http://www.temoignages.re/etats-generaux-region-departement-la-reunion.html

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