À propos de ’L’aveu’

Le témoignage de Lise et Artur London

24 août 2005

Entre 1949 et 1954, en Tchécoslovaquie, plus de 40.000 personnes furent jugées pour soi-disant, atteinte à la sûreté de l’État. Les juifs et les intellectuels furent les premiers visés. Voici en substance la première chose qui devait être dite sur les circonstances de ce qu’il faut bien appeler un crime perpétré à l’époque des purges staliniennes en Tchécoslovaquie.

Le film de Costa-Gavras que nous verrons ce soir sur Tempo, retrace un des moments les plus symptomatiques de ces purges menées par des hommes sans une once d’humanité, qui sous des prétextes fallacieux, enlevaient des hommes, des femmes et leur faisaient subir les pires des tortures afin qu’ils avouent.
Avouer quoi ? Qu’importe l’aveu qui était fait, la seule ligne admise c’était de tenter d’éliminer ceux qui faisaient peur, ceux qui représentaient l’intelligence, le savoir, et qui étaient dangereux face à des hommes de pouvoir dérivant vers le fascisme. "L’aveu", dans le contexte actuel, alors que les archives s’ouvrent, devient un élément de l’Histoire.
À la sortie du film, les murs n’étaient pas encore tombés que déjà, plusieurs partis communistes (dont le PCI, le PCF et le PCR) avaient rejeté en bloc le stalinisme, notamment le PCR qui fut le premier à avoir condamné avec force l’invasion de la Tchécoslovaquie par les armées du pacte de Varsovie.
Dans cette époque trouble, au sortir des événements de mai 1968, Costa-Gavras venait de frapper un grand coup, en portant à l’écran, ce qui allait devenir un véritable brûlot. Comme chacun, je me suis précipité dans les salles pour me rendre compte de quelle manière on foulait du pied un idéal qui de mon point de vue, n’était pas si moribond que l’on voulait bien le dire. Ce que l’on peut évoquer de cette période de terreur, c’est le détournement qui a été fait de l’idéologie communiste par des staliniens sans foi ni loi, qui n’ont eu de cesse de remplir les camps de travail.

Deux grands résistants et communistes

Pour en revenir à "L’aveu" et aux témoignages d’Artur et de Lise London, il faut sans aucun doute redonner leur place aux deux grands résistants et communistes qu’ils ont été. Artur et Lise London ont tous deux combattu en Espagne dans les Brigades Internationales, tous deux ils ont subi les affres du fascisme et ont été déportés. C’est du dévoiement d’une idéologie qui représentait un espoir pour un monde juste et meilleur, que les progressistes qu’étaient à l’époque Yves Montand, Simone Signoret et Costa-Gavras, ont voulu témoigner à travers ce film.
Lise London a su récemment prouver combien elle était attachée à ces luttes, cette jeune femme de 83 ans a repris tout dernièrement sa carte du Parti communiste français, elle a aussi, avec Lucie Aubrac, été à la pointe du combat contre le projet de Traité constitutionnel européen en signant un appel avec de nombreux autres résistants pour dire "non" à ce traité ultra-libéral. Cette communiste hors du commun est à l’origine de l’Union des femmes françaises.
Dès juillet 1940, Lise London entre dans la Résistance. Elle est membre de la direction du mouvement des Femmes patriotes de la région Île-de-France. En août 1942, elle prend la tête d’une manifestation en plein cœur de Paris et appelle à la lutte armée. Arrêtée et emprisonnée, elle est jugée un an plus tard, le 15 juillet 1943, par le Tribunal d’État français, qui requière sa condamnation à mort. Elle doit la vie, à la naissance en prison, de son fils Gérard, né le 3 avril 1943. Condamnée aux travaux forcés à perpétuité, elle est déportée à Ravensbrück en mai 1944, comme son mari, Artur London , lui aussi, déporté dans les camps de concentration nazis.

De l’ombre sortent des militants

On aime à dénigrer le communisme, mais jamais on ne dit mot, lorsque de l’ombre sortent des militants, à qui l’on doit notre liberté. Il serait bien trop long ici d’égrener la longue litanie des communistes patriotes qui sont morts ou qui ont combattu pour un idéal, toujours à construire. Je me souviens qu’un jour Jacques Chaban Delmas à l’Assemblée nationale, a apostrophé M. Poniatowski qui traitait les communistes de fascistes, en lui rétorquant qu’il était inadmissible de porter des injures aussi terribles à des camarades, qui les premiers, se sont fait tuer pour la France. Il a réclamé des excuses.
Je me dis toujours que le communisme est un beau rêve soigneusement rangé dans une boîte et que jamais encore, il n’a été réalisé. Certains ont beau jeu de jeter systématiquement dans les poubelles de l’Histoire, Marx, Proudhon, Jaurès et bien d’autres, mais le dernier référendum a su mettre en relief cette classe opprimée qui s’est ressaisie.
Pour les générations qui s’avancent et qui ce soir vont découvrir "L’aveu", j’aimerais leur dire que l’idéal communiste ou socialiste existe bien et que ce n’est pas cela ! Ce qu’ils vont voir, c’est comment des personnes qui se sont arrogé le pouvoir, des iconoclastes, avides et sauvages détruisent des femmes, des hommes, des humanistes qui forgent l’Histoire. Je terminerai non sans vous avoir fortement conseillé de voir "L’aveu", par cette phrase de Lise London  : "La valeur de la vie ne se mesure pas au nombre d’années vécues, mais à sa richesse et à la profondeur de l’empreinte que nous laissons derrière nous sur Terre".

Philippe Tesseron
http://www.espaceblog.fr/teletesseron/


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Messages

  • c’est du masochisme
    après avoir subi ça, un esprit sain se serait éloigné de cette doctrine totalitaire
    j’ai connu le système en discutant avec d’anciens prisonniers roumains condamnées par les cocos

    on comprend que des anciens nazis aient gardés la foi dans leur doctrine
    pourquoi pas ?

    Jefferson ne disait-il pas que : "Une constante vigilance est le prix à payer pour rester libres"