Transports aériens

Air Bourbon : la responsabilité de l’État

1er décembre 2004

Le passage en comète de la compagnie dans l’espace aérien réunionnais aura réussi à ternir les efforts du Comité du tourisme de La Réunion. Et l’Etat, qui a laissé la compagnie voler malgré sa fragilité financière, est responsable de la sécurité due aux passagers floués.

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Dans le transport de voyageurs, tous les incidents ou accidents de parcours ne prêtent pas tous également à conséquence. Si un contrôle doit s’appliquer dans tous les cas - sur la fiabilité des véhicules en particulier - la faillite d’une société d’autobus a rarement des conséquences aussi graves et amples que celle d’une compagnie aérienne - qu’il s’agisse du reclassement des salariés ou du sort des passagers livrés à eux-mêmes dans un aéroport, à des milliers de kilomètres de chez eux, sans perspectives et sans interlocuteur. C’est la situation vécue par les passagers d’Air Bourbon, cloués au sol par la gestion hasardeuse des dirigeants de la jeune compagnie.
Beaucoup se disent déjà que le passage en comète de M. Lazarus dans l’espace aérien régional aura réussi à ternir au bout de dix-huit mois les efforts du Comité du tourisme, depuis plusieurs années, pour rendre attractive la destination Réunion. Pour La Réunion, c’est un des aspects - et pas le moindre - de cet immense désastre financier et humain.
Mais sur un plan plus global, et même si ce n’est pas dans l’air du temps, pas dans la philosophie ambiante d’une économie concurrentielle où les capitaux sont les maîtres, ne faut-il pas se demander s’il ne serait pas dans les attributions de l’État de s’impliquer davantage ?

"Ils nous ont laissés faire"

Il pourrait dans un premier temps être beaucoup plus rigoureux dans le contrôle des compagnies. Peut-il succomber à des “pressions aimables” en laissant, au final, les conséquences de sa légèreté retomber sur les usagers des vols ? C’est-à-dire sur des citoyens qui choisissent une compagnie en se disant que, si elle est autorisée à voler, c’est que les autorités l’ont jugée fiable.
Les dirigeants d’Air Bourbon peuvent dire aujourd’hui de la direction de l’Aviation civile et des ministères de tutelle : "Ils nous ont laissés faire, prêts à nous applaudir en cas de réussite". Mais tous savaient que la société était sous-capitalisée dès le départ et tous l’ont laissée déployer une activité à haut risque.
Aujourd’hui, le tribunal de commerce doit examiner la situation d’Air Bourbon, et prononcera soit le redressement judiciaire, soit la liquidation de la compagnie.
Devant l’évidence de la cessation d’activité, et sans préjuger de son issue, ne serait-il pas normal que l’État ait envers les passagers d’Air Bourbon une intervention à la hauteur de ce qui a été fait pour les passagers victimes de la fin d’Air Lib ?
La décision d’affréter deux avions, Corsair et Air Austral - et peut-être trois avec Air France - et d’en partager les dépenses entre l’État (2/3) et les collectivités territoriales (1/3) est un pas dans cette direction. Qui ne devrait pas faire oublier la responsabilité de l’État, in fine, dans la sécurité due aux voyageurs.

P. David


Dotation de continuité territoriale : la Région dément

Le Conseil régional a diffusé hier le communiqué suivant :
"En dépit d’un mandatement récent de trois millions d’euros sur les huit millions d’euros attribués à La Réunion, la dotation de continuité territoriale destinée aux Réunionnais n’est toujours pas mobilisable par la Région Réunion car les autorités communautaires européennes n’ont toujours pas approuvé le dispositif.
"En effet, l’utilisation de cette dotation ne peut se faire que dans le respect du cadre législatif et communautaire en vigueur. La Région Réunion a défini les publics bénéficiaires de cette dotation, lors d’une assemblée plénière, le 29 juin dernier.
"Cette délibération fixant les critères d’éligibilité à ce dispositif a été envoyée au ministère de l’Outre-mer, qui l’a transmise à la commission européenne à Bruxelles. C’est elle et elle seule qui peut approuver le dispositif proposé par la Région Réunion et le rendre opérationnel. À ce jour, mardi 30 novembre, aucune réponse n’est encore parvenue de Bruxelles.
"Dans ce contexte, il est donc impossible d’affecter aujourd’hui cette dotation, en totalité ou en partie, aux bénéficiaires visés par la délibération de la Région, et a fortiori, à tel ou tel autre public.
"Si les critères d’éligibilité et les modalités d’attribution devaient être redéfinis, une nouvelle délibération de l’assemblée plénière de la Région serait nécessaire, et le dispositif modifié devrait alors être impérativement et préalablement transmis au gouvernement, pour de nouveau être notifié à Bruxelles pour agrément.
"Répétons-le, la Région se trouve actuellement dans l’impossibilité de faire bénéficier les Réunionnais de la dotation dite de continuité territoriale, alors même qu’elle a déjà accompli tous les actes nécessaires. Elle est toujours dans l’attente de l’approbation de Bruxelles.
"Par conséquent, la manœuvre grossière, visant à faire croire à des passagers sinistrés, qu’une solution financière peut leur être apportée instantanément relève de la pure démagogie et d’une volonté de tromper l’opinion.
"La Région Réunion ne peut que regretter que les passagers d’Air Bourbon soient, à nouveau, victimes de mensonges et de faux espoirs."


Passagers bloqués : seulement deux vols spéciaux

Pour les passagers d’Air Bourbon, les réservations sur les vols spéciaux de Corsair et Air Austral sont toujours ouvertes à l’aéroport de Gillot et dans les autres points de vente de ces compagnies.
Le vol Corsair du 2 décembre et le vol Air Austral du 3, proposés en priorité aux passagers d’Air Bourbon ayant acheté un billet pour un départ vers la Métropole jusqu’au 6 décembre, seront les seuls vols spéciaux : aucun autre avion ne sera affrété par les pouvoirs publics.
En conséquence, il est vivement recommandé aux passagers d’Air Bourbon qui sont détenteurs d’un billet pour un départ après le 6 décembre de prendre dès maintenant leurs dispositions pour trouver une place dans d’autres avions. Les capacités de desserte aérienne ont été augmentées à cet effet.
Le tarif de 300 euros reste valable jusqu’au 9 décembre pour les passagers d’Air Bourbon, qu’il s’agisse d’un retour ou d’un aller simple ; il s’applique non seulement aux deux vols spéciaux mais également aux vols réguliers où se sont libérées des places. Au-delà de cette date, les tarifs normaux s’appliqueront.


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