A 20 heures sur Télé Réunion

“Victimes oubliées”

27 janvier 2005

Ce soir, RFO propose sur Télé Réunion une émission spéciale présentée par Marie-José Alie pour commémorer le 60ème anniversaire de la libération des camps de concentration et d’extermination nazis.

(Page 14)

Le thème de cette émission spéciale produite par RFO est “la condition des Noirs dans le système concentrationnaire” et le racisme particulier dont ils étaient l’objet. Durant une heure, témoignages rares, images d’archives, journal de guerre, et débats vont se succéder.
Parmi les invités, on pourra écouter John Williams, chanteur connu, rescapé des camps de concentration, qui reviendra sur sa captivité et nous donnera un aperçu de ce qu’était être un Noir dans un camp de concentration.
Il y aura aussi Édouard Glissant, écrivain, poète réputé qui décrira la situation des Noirs à cette époque.
Parmi les invités, on retrouvera également l’historien, politologue et journaliste Alexandre Adler, qui interviendra sur le contexte historique, mais plus précisément sur une spécificité du fascisme allemand en Europe, un racisme particulier, ce rejet du métissage qui poussera les nazis à de terribles exactions.
Enfin, Eric Deroo, chercheur associé au CNRS, spécialiste de l’impact de l’image dans les comportements - en particulier de l’image des communautés noires pendant la première partie de ce siècle -, interviendra sur la perception européenne du Noir.
Différents sujets d’archives seront diffusés tout au long de l’émission pour faciliter la compréhension de la thématique abordée. D’autres documents ont été spécialement extraits des archives de la Défense Nationale. Un reportage réalisé par le journaliste Thierry Ravalet propose des entretiens effectués avec deux historiens allemands, Peter Martin et Heiko Möhle. Il s’agit de retracer la genèse du racisme envers les Noirs en Allemagne, durant cette période.
Peter Martin a publié un ouvrage qui fait figure de référence en ce qui concerne la situation des Noirs, sous le régime nazi. Ces propos sont complétés par ceux d’Heiko Möhle, qui est spécialisé dans l’Histoire de la colonisation allemande. En effet, pour comprendre la barbarie nazie, il faut remonter aux débuts de la conquête coloniale allemande, avec le massacre des Hereros.
Le dernier sujet sera un retour dans le présent puisqu’il s’agit d’un micro trottoir réalisé avec le concours des stations de la Martinique, de la Guadeloupe et de La Réunion.
Les débats approfondiront les thèmes clefs de cette période : quelle était la nature de la doctrine hitlérienne ? Comment vivait-on au quotidien dans les camps ? La déportation et l’esclavage exposaient-ils aux mêmes souffrances ?
(Source : RFO)


Il y eut un avant l’Holocauste et depuis 60 ans il y a un après...

La commémoration du 60ème anniversaire de la libération des camps nazis donne lieu à un grand nombre d’images, de documentaires et de débats sur nos chaînes de télévision. Devons-nous nous en plaindre ? Non, bien sûr. Bien au contraire, il faut s’en féliciter car cela permet au public d’être informé sur la tragédie de la Shoah. Et dans ces commémorations télévisées souvent tardives de ce crime contre l’humanité, RFO a eu le reflexe de consacrer une émission à des “victimes oubliées”, les Noirs.
Quand les nazis arrivent au pouvoir en Allemagne en 1933, des centaines d’enfants, fruits des amours entre Allemandes et soldats africains des troupes françaises qui occupèrent la Rhénanie en 1918, vivent en Allemagne.
Dans “Mein Kampf”, Hitler écrivait que "ces enfants étaient nés d’un complot juif visant à bâtardiser l’Europe". Sous le régime nazi, les enfants afro-allemands furent catalogués "bâtards rhénans", stérilisés de force et déportés.
Johnny William, dont la mère était Africaine et le père Français, a donné une description de la vie dans un camp de concentration. Johnny avait été arrêté par la Gestapo et envoyé au camp de Neuengamme près de Hambourg. "On était cinq ou six Noirs, raconte-t-il. Dès notre arrivée, les SS nous ont séparés des prisonniers Blancs. Ils nous considéraient comme des sous-hommes, des animaux, des singes".

Travail de mémoire

Horreur, innommable horreur d’un crime, qui a des racines bien antérieures à la Shoah. La couleur de la peau, puis les croyances, la classification des “races” et l’idée que l’on pouvait reconnaître un Juif à la forme de son nez ou de son crâne est né il y a bien longtemps. Déjà au moyen-âge, les Juifs étaient caricaturés. Pour les Noirs, bien avant “Mein Kampf” et après, on a vu imprimer des textes sur la soi-disant infériorité de la personne noire. Le devoir de mémoire doit toujours être recommencé et n’oublions pas qu’avant ce monceau d’ordures écrit par Hitler, il y eut le non moins sinistre “Code Noir” signé par le roi de France.
L’exploitation des Noirs et l’esclavage qui en a découlé a ouvert les portes à des idées nauséabondes qui perdurent encore aujourd’hui dans la tête de petits nazillons. Il est encore des hommes politiques en France pour dire que les Noirs sont inférieurs aux Blancs ; on leur fait des procès, ils perdent, ils payent une amende. On retrouve quand même 20% de Français qui votent pour eux ! (Ne devrait-on pas retirer les droits civiques aux auteurs d’injures racistes et aux négationnistes ?)
On peut remonter à un zoologiste allemand vivant en Namibie au 19ème siècle, Ernst Haeckel, pour qui les "cheveux laineux des Nègres" suffisaient à prouver leur incapacité à évoluer vers une intelligence supérieure.
Enfin, avant “Mein Kampf”, un généticien allemand, le Docteur Eugène Fisher, explique, bien avant la première guerre mondiale, qu’il faut stériliser tous les Noirs car pour cet apprenti sorcier, les rapports sexuels entre colons allemands et femmes africaines représentaient une menace pour la "pureté génétique de la race aryenne".
Si tous les comptes ne sont pas soldés avec les descendants des peuples meurtris, il est une idée sur laquelle on ne pourra faire l’impasse, c’est qu’il y eut un avant l’Holocauste et depuis 60 ans il y a un après... Ce soir, nul doute que pendant la diffusion de “Victimes oubliées”, bon nombre de Réunionnais par devoir de mémoire vont sentir à nouveau le vent de l’Histoire leur cingler les oreilles. Il est quand même regrettable qu’une nouvelle fois, ce type d’émission ne soit adressé qu’à la population domienne ; on se demande si la France métropolitaine accepte ce travail de mémoire. Peu de gens savent que les Noirs ont souffert comme les Juifs de la persécution nazie.
À quand une grande émission sur la négritude, depuis la traite des esclaves jusqu’à nos jours, sans rien omettre, diffusée sur l’ensemble de la France, à une heure de grande écoute ? France Télévision nous avait promis une inter-réactivité entre les chaînes après l’absorption de RFO ; qu’en est-il ?

Philippe Tesseron


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