Crédits européens en baisse, planteurs menacés, mondialisation libérale de l’économie... Devant l’aggravation de la situation, appel de Paul Vergès et de l’Alliance

Se mobiliser pour relever les défis du million d’habitants

20 juin 2005

En présence de toutes les composantes de l’Alliance, le président de la Région a évoqué hier tous les secteurs où la situation s’aggrave. Alors que notre pays va compter durant les six prochaines années entre 80.000 et 100.000 habitants supplémentaires, c’est l’incertitude sur le volume des crédits qui seront alloués par l’Union européenne pour répondre à nos besoins d’investissements. Une seule chose est sûre : ces crédits diminueront. C’est ce qu’a affirmé le président de la Commission européenne.

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Après le rejet d’un projet de traité qui constituait une Europe ultra-libérale, quelques jours après la rencontre des présidents des RUP avec le président de la Commission européenne, au lendemain du dernier Conseil européen et à la veille de la séance plénière de la Région, le président du Conseil régional avait convié la presse hier après-midi pour faire part à l’opinion de "la nécessaire prise de conscience de l’aggravation de la situation et de ses conséquences pour La Réunion". Le blocage au plus haut niveau de l’Europe et donc l’absence de décision prise pour le budget ne font qu’amplifier l’inquiétude.
Au premier rang des inquiétudes, la diminution des crédits FEDER et FSE. L’échec du dernier Conseil européen des 16 et 17 juin (voir en page 16) signifie que les Fonds structurels dont nous bénéficions pour la période 2006-2013 ne sont pas connus. Conséquence pour La Réunion : "on ne peut pas avoir de programmes d’investissement et de recherche car ce sont des actions pluriannuelles". Comment alors prévoir par exemple les formations, les lycées et les collèges à construire ?

2 milliards de francs en moins

De cette incertitude, il est tout de même une donnée qui revient : ces crédits dimueront, car le budget reste constant, alors que le nombre de régions ayant droit à des fonds structurels au même titre que notre île est en augmentation du fait de l’élargissement à 10 et bientôt 12 nouveaux pays. De la rencontre des présidents des RUP la semaine dernière à Strasbourg avec le président de la Commission européenne, il ressort que devant cette baisse prévisible, le chef de l’exécutif européen appelle les dirigeants des RUP à faire pression auprès de leurs gouvernements respectifs pour atténuer les conséquences de cette diminution.
Plusieurs éléments font état d’une baisse possible de 20%. Cela signifie pour La Réunion, souligne Paul Vergès, 300 millions d’euros en moins pour les six prochaines années. Dans ces conditions, "comment rattraper nos retards alors que la population va augmenter de 80.000 à 100.000 habitants, avec en même temps les conséquences du nouveau règlement sucrier ?".
Ce deuxième point est aussi un enjeu décisif, au moment où la prochaine campagne sucrière se prépare. Paul Vergès rappelle qu’à Maurice, le gouvernement et les professionnels font front et parlent de menace mortelle quand ils évoquent la réforme du règlement sucrier européen. "Ils prévoient d’arracher 17.000 hectares de cannes", indique Paul Vergès, soit, en comparaison, presque l’équivalent de la sole cannière réunionnaise.
Ce nouveau règlement sucrier européen, qui prévoit pour La Réunion une baisse du prix du sucre et une compensation inférieure à la perte, est une condition imposée par la mondialisation des marchés dans le cadre des négociations à l’OMC sur l’ouverture des services. "Le poids des problèmes sociaux dans nos pays pèsera-t-il devant l’intérêts des grands pays européens qui doivent obtenir un accord sur les services d’ici la fin de l’année et le sommet de l’OMC à Hong-Kong ?", interroge Paul Vergès. Le parlementaire rappelle que des milliers d’emplois sont en jeu : planteurs, travailleurs des usines et des transports.

Non à la sous-estimation

Les accords de partenariat économique entre l’Union européenne et les pays de notre environnement régional sont une autre facette de la mondialisation des échanges qui peut avoir de graves conséquences pour La Réunion si de tels accords ne comportent pas une clause de protection pour notre économie vulnérable. "Quand on voit Maurice qui se positionne comme une île “hors taxe” pour les produits à consommation immédiate, que restera-t-il à La Réunion", précise Paul Vergès, indiquant que nos productions seraient directement concurencé à La Réunion par des importations en provenance de pays à très bas salaire.
Baisse des crédits européens, remise en cause de la filière canne-sucre, accords de partenariats économiques : autant de dossiers brûlants sous-estimés d’après le président de la Région. Contrairement à Maurice, où l’opinion est informée dans la transparence de tous ces problèmes, à La Réunion on cherche à rassurer, ce que n’admet pas Paul Vergès. Car, souligne le président de la Région, ces événements risquent de nous mener rapidement "vers une des plus graves crises sociale et économique de La Réunion". Une crise qui ne trouvera pas sa solution dans des mesures décidées dans des bureaux parisiens et appliquées mécaniquement ici mais dans le rassemblement des Réunionnais : "Les Réunionnais doivent proposer des solutions dont ils assument les responsabilités".

Manuel Marchal


Emploi : sauver les CES

Alors que les crédits d’investissement vont diminuer, et que cette baisse n’est pas encore précisément connue, des responsables politiques réunionnais font pression sur la Région pour qu’elle finance des contrats d’avenir. Pour Paul Vergès, céder à ces pressions est de l’irresponsabilité politique. Car tout d’abord, ces contrats d’avenir ne règlent rien, ils ne font que repousser le problème des chômeurs qui en bénéficierait de 3 ans. Ensuite, à l’heure où les crédits d’investissement diminue, ce n’est pas le moment d’augmenter ceux consacrés au financement.
Sur la question de l’emploi, une des priorités évoquées par le président de la Région est le maintien des crédits des CES-CEC pour l’année prochaine. "Une solution provisoire à partir de laquelle nous devons montrer notre volonté de proposer des solutions sur du long terme", note Paul Vergès.


Boulversement politique en Europe

Tirant les enseignements de la victoire du “non” au référendum sur la Constitution européenne, Paul Vergès note que depuis le 29 mai dernier, toute la situation politique est boulversée à l’échelle européenne. "La crise très grave qui secoue l’Europe montre qu’elle était bien antérieure à la consultation sur la Constitution", le campagne référendaire et le résultat du 29 mai révèlent la crise. Car, le président de la Commission et le président du Conseil européen l’affirment : ceux qui ont voté “non” au traité ont voté pour une autre Europe.
Autre enseignement : le résultat du référendum traduit "la rupture entre les élites politiques et la masse de la population. C’est une coupure sur laquelle les responsables politiques doivent réfléchir".
Depuis le 29 mai, les problèmes sont mis sur la table : le “chèque britannique”, la PAC, la contribution des Pays-Bas, "et les sondages montrent que la majorité est contre l’euro", en particulier en Allemagne.
"Et quand le Premier ministre britannique attaque la PAC, les paysans français se disent qu’ils ont bien fait de voter “non”", souligne Paul Vergès qui rappelle qu’à 70%, les agriculteurs français ont repoussé la “Constitution Giscard”.
"Quelle Europe veut-on, vers quel modèle social veut-on aller ?", interroge Paul Vergès, "vers ce qui se fait en Grande-Bretagne et aux États-Unis, ou vers la défense des acquis sociaux ?". C’est là que se situe le cœur des batailles actuelles, précise le président de la Région.


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